Brasseur artisanal ou industriel : les mêmes problématiques
Brasserie Saint-Germain : La passion de la bière
A force de ténacité, les fondateurs de la Brasserie Saint-Germain ont réussi à trouver leur place en région, avec pas moins de 11 bières en portefeuille.
Cest avant tout la passion de la bière qui a conduit Vincent Bogaert, son frère Stéphane et leur ami Hervé Descamps (photo) à créer en 2003 la brasserie Saint-Germain à Aix-Noulettes. Une passion si forte, confesse lintéressé, qu'elle amène ce charcutier de formation à réorienter sa carrière comme salarié dune micro-brasserie, un débit de boissons produisant ses propres bières.
Vincent Bogaert nhésite pas à revendre sa maison pour contribuer au capital de départ de lentreprise puis à emprunter
1 M avec ses associés, pour léquiper. « On aurait pu faire moins cher, reconnait-il. Mais nous voulions faire ça comme des pros : privilégier la qualité, anticiper des normes plus contraignantes, pouvoir recevoir du public. »
Lancée sous la marque « Page 24 », avec une blonde originale à 5,9 degrés, la production porte aujourdhui sur 11 types de bières dont 9 permanents. La brasserie, de 8 personnes désormais, a produit lan dernier 6.400 hectos pour un CA tangentant 1,5 M.
Les débuts nont pourtant pas été aisés. Aujourdhui encore, les trois associés se contentent dun salaire modique. Au démarrage, ils ont essuyé pas mal de refus de vendre leur bière de la part de gens sur qui ils comptaient. Il leur a fallu sinvestir à fond dans le relationnel : accueillir eux-mêmes les clients dans leur boutique, écumer foires et salons, nouer des contacts avec les directeurs de magasins et les chefs de rayon. Autant de tâches quils poursuivent aujourdhui pour maintenir un rapport de proximité avec la clientèle.
Ces difficultés ne les ont pas dissuadés demprunter de nouveau 1 M il y a deux ans, pour doubler la capacité à 1.000 hl et remédier ainsi à la saturation qui sannonçait, sans pour autant renoncer à produire certaines bières, ni dégrader la qualité en réduisant la durée de maturation en cuve.
Pour rentabiliser linvestissement, les associés comptent dabord sur lexport. La brasserie vend déjà à létranger ( Brésil, Chine, Italie ) mais pas au-delà de 4 % de son CA. Cest pourquoi, elle adhère à lassociation French Craft Brewers constituée pour promouvoir les bières de ses membres hors de France.
Autres objectifs des brasseurs dAix-Noulette : développer la diffusion de leurs produits dans le réseau des CHR régionaux, via le grossiste adéquat, et mieux toucher les chaînes de distributeurs indépendants existant çà et là en France et regroupant les points de vente par dizaines. De quoi atteindre, selon Vincent Bogaert un rythme de 8.000 hl par an « en prenant le temps quil faut pour y parvenir. »
CJ
Brasseur industriel
Face aux majors, Duyck cultive son originalité
Le brasseur de Jenlain vient de franchir les 100.000 hectos pour un chiffre d'affaires de 15 M. Ses problématiques sont pourtant proches de celles des brasseurs artisanaux.
Duyck appartient aujourd'hui au club des leaders de la bière de spécialité. Mais atteindre ce stade a nécessité des investissements colossaux, rappelle Raymond Duyck, son dirigeant. A commencer par une nouvelle salle de brassage, pour répondre à lexplosion du marché des bières de spécialité dans les années 80, consécutive à la montée en puissance de la grande distribution. Un impératif lourd, d'autant que, par souci dindépendance, la société a choisi d'autofinancer au maximum. Depuis les années 90, la progression est plus lente mais la nécessité dinvestir tout aussi forte. L'acuité croissante de la concurrence a conduit la brasserie à passer dune activité mono-produit, la fameuse Jenlain ambrée, à sa gamme actuelle de sept bières permanentes. Au début des années 2000, son exploitant investit encore 5 M pour améliorer la qualité de la production et réduire son impact environnemental. Ces dernières années, les efforts ont porté sur l'élimination des goulots détranglement, de nouvelles cuves de fermentation ou de garde et une nouvelle chaîne de conditionnement en boîtes.
[caption id="attachment_9058" align="alignleft" width="348" caption="Une exigence d'investissement constant. Ici, la dernière ligne de conditionnement en boîtes"][/caption]
Duyck doit également doper ses ventes à lexport, qui n'ont jamais dépassé 5 % du CA. « On en est plus à faire des coups quà mettre en uvre une politique durable, reconnaît Raymond Duyck. La France nest pas perçue à létranger comme un pays de bière. A cet égard, son image reste à construire. »
Sur ce chapitre, la brasserie a opté pour la coopération. Avec le producteur de la bière corse Pietra, elle sest trouvé un importateur aux USA, grâce à un VIE ad hoc. Elle adhère également à lassociation French Craft Brewers ( (lire par ailluers).
Miser sur les réseaux sociaux
Duyck cultive sa différence ailleurs, à travers une communication très originale. A 100.000 hectos annuels, Raymond Duyck ne peut plus, comme ses confrères dAix-Noulette, en être le vecteur essentiel. Mais il n'a pas les moyens de campagnes de 4 x 3, de presse ou de radio. Pour résoudre la quadrature du cercle, la firme a misé avec succès sur les réseaux sociaux. Et fait parler delle en proposant aux internautes des applications Facebook, sous forme de jeux, comme effectuer un tour du monde virtuel en ballon, ou des web-séries mettant en scène ses salariés. Elle a lancé cet été, en partenariat avec la commune de Jenlain, un festival de très courts métrages danimation invitant les internautes à réaliser un sujet sur le thème de lindépendance.
Poursuivre dans cette voie et développer lexport seront bientôt la tâche de la cinquième génération de Duyck, le fils de Raymond venant d'intégrer lentreprise pour prendre dans quelque temps la suite de son père.
C.J
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