Numéro 145

Numéro 145

Publié le 30/04/2024

L'édito

Paradoxes

La crise financière de notre pays écrase le reste de l'actualité depuis plusieurs semaines. Dérapages totalement incontrôlés, menaces sur les notations internationales, et désormais concours Lépine des hausses d'impôts. Hormis quelques vox clamantis in deserto, le sujet était systématiquement nié ou minoré : la dette européenne pouvait prendre le relais, grâce à la complaisance supposée de la BCE, on pourrait « rouler » indéfiniment la dette, et de toute façon l'actif net de la France est si important qu'il couvrirait largement les engagements du pays.

Il n'est pire sourd que celui qui ne veut point entendre. Car l'Etat a largement fait appel à de grands groupes de consulting, et les rapports récurrents de la Cour des Comptes alertent depuis longtemps sur l’inexorable dégradation de la situation française. Le niveau d'information des dirigeants n'a jamais été aussi affûté. On doit y ajouter le simple benchmarking : l'ensemble de nos voisins européens ont adopté des mesures de redressement de leurs comptes, tout particulièrement après la crise Covid. Il ne fallait pas être grand clerc pour comprendre que l'exception française ne pourrait pas durer indéfiniment.

Gisement de productivité publique

Le climat général est devenu anxiogène. Mais ne pourrait-on pas voir dans notre défaillance collective une chance unique ? En effet, notre immobilisme quasi total dans la réforme de l'Etat nous offre paradoxalement un gisement de productivité publique absolument gigantesque. Un seul chiffre : l'Allemagne, qui compte 16 millions d'habitants de plus que la France, gère son administration avec un million de fonctionnaires en moins. Et puisque nous semblons être incapables de trouver où réduire le périmètre métastatique de l'Etat, pourquoi ne pas demander à l'intelligence artificielle de nous y aider en mesurant l'efficacité relative des structures publiques ? Et pourquoi pas interrroger directement les Français ? Notre appétit pour les états généraux de toutes sortes aurait cette fois un thème d'importance stratégique pour apporter à un appareil d'Etat aussi obèse qu'impuissant un début de solutions. Quitte même à les adopter par un référendum apportant à l'exécutif une légitimité qui lui fait tant défaut.