Commande publique et flambée des prix : où en est-on ?

"Il est possible de modifier, par avenant, le prix d’un marché public."

Publié le 24/02/2023 par Equipe Eco121 / Lecture libre / Temps estimé: 2 minutes

Charles-Eric Thoor, avocat senior, Bignon Lebray.
Charles-Eric Thoor, avocat senior, Bignon Lebray.

Par une circulaire du 30 mars 2022 relative « à l'exécution des contrats de la commande publique dans le contexte actuel de hausse des prix », le Premier ministre Jean Castex invitait les acheteurs publics, à aider les titulaires de marchés publics et de concessions, face au contexte inflationniste.

Le Premier ministre préconisait alors d’allonger les délais d’exécution, de « geler les pénalités contractuelles », ou encore d’autoriser la substitution de certains matériaux, par des matériaux moins onéreux.*

Modification du prix, avec accord de l'acheteur

Le Premier ministre se gardait toutefois de répondre à cette question centrale : peut-on augmenter le prix d’un marché public, après sa conclusion ? Bercy, en sa qualité de gar- dienne du temple des finances publiques, soutenait que non. Par un avis du 15 septembre 2022, le Conseil d’Etat a finalement tranché la question, estimant au contraire que « rien n’empêche que les modifications des marchés et contrats de concession portent uniquement, en vue de compenser les surcoûts que le titulaire ou le concessionnaire subit du fait de circonstances imprévisibles, sur les prix ou les tarifs prévus au contrat ».

Il est donc possible de modifier, par avenant, le prix d’un marché public.

Toutefois, la conclusion d’un avenant, suppose l’accord des deux parties, et les opérateurs économiques se trouvent souvent dépourvus, face à des acheteurs publics inflexibles, qui n’ont que peu d’intérêt à rehausser le prix d’un marché public, que le titulaire est de toute façon tenu d’exécuter, aux conditions initialement convenues.

Droit à indemnisation, en cas de déficit

La seule hypothèse, dans laquelle le titulaire a droit à une indemnité compensatoire, est celle dite de l’ « imprévision », mais ses conditions sont extrêmement restrictives : le titulaire doit prouver que la hausse des prix était imprévisible, et lui fait perdre de l’argent.

Une perte de marge ne suffit pas, le titulaire devant établir, pièces comptables à l’appui, un déficit d’exploitation, de l’ordre de 10% au minimum, sur l’exécution du contrat. Autant dire que la démonstration n’est pas aisée, et que les demandes d’indemnisation finissent régulièrement au contentieux.

*Comme beaucoup d’entre nous, le droit de la commande publique a visiblement été pris de court, par la hausse soudaine des prix, et peine à s’y adapter.