Barthélémy Guislain : « La crise risque d’être durable »

Le président de l’Association Familiale Mulliez était l’un des invités des « cafés de l’Après » organisés par le Comité Grand Lille pendant le confinement. Cet homme clé de la galaxie Mulliez tend la main à l’écosystème régional.

Publié le 28/05/2020 par Julie Kiavué / Lecture libre / Temps estimé: 3 minutes

Barthélémy Guislain, président de l’Association Familiale Mulliez.
Barthélémy Guislain, président de l’Association Familiale Mulliez.

Relance économique, digital, intelligence collective... Le président de l’Association Familiale Mulliez était l’un des invités des « cafés de l’Après » organisés par le Comité Grand Lille pendant le confinement. Cet homme clé de la galaxie Mulliez et de ses 800 000 salariés dans le monde tend la main à l’écosystème régional.

« L’après va être long », lance Barthélémy Guislain de but en blanc. Le président de la discrète Association Familiale Mulliez (Auchan, Leroy Merlin, Décathlon, Kiabi, Norauto, Flunch, Rouge-Gorge...) a d’abord dressé un bilan du confinement sur les entreprises de la famille. Ce furent des semaines compliquées. « Avec le confinement des habitants du monde entier et la fermeture des commerces, notre activité a été lourdement pénalisée ». Les secteurs textile et restauration étaient quasi à l’arrêt. Tandis que pour les surfaces alimentaires, le tableau était plus contrasté. Malgré « une gestion de trafic des clients très contraignante ». Quant aux commerces spécialisés, à l’instar de Boulanger, Leroy Merlin ou bien Décathlon, ils ont résisté, avec une baisse d’activité comprise entre 30 et 60%. « Réussir à faire du chiffre et garder le lien avec les clients avec des enseignes fermées relève de l’exploit !, décrypte le président de l’AFM, par ailleurs co-fondateur et Dg de Kbane, enseigne de rénovation d’habitat. Ça a demandé beaucoup de créativité et d’inventivité ».

Accélérateur de tendances

Si la crise du confinement fut intense, l’avenir ne sera pas de tout repos, estime-t-il. La baisse de l’activité économique risque d’être durable en France et en Europe. Tout comme elle l’a été en Chine, où Auchan dispose de 600 hypers. L’activité y était encore en berne deux à trois mois après la levée du confinement. Faisant émerger une nouvelle forme de consommation : le « picking ». « Nous préparons les commandes des clients directement dans nos magasins, explique Barthélémy Guislain. Dans chacun de nos hypermarchés, les équipes préparent jusqu’à 1 000 commandes par jour. Ce qui nous permet de maintenir une bonne activité et d’atteindre nos objectifs ». Pour le dirigeant, la crise est un accélérateur de tendances. Les entreprises doivent alors se digitaliser au plus vite. Celles de l’AFM avaient pris le tournant, « mais pas assez vite », juge son président. « Sur ce sujet, on doit mettre le paquet en investissement et en effort ».

Partir lancé et foncer

Comment bien réussir sa reprise ? « La mise en sécurité financière de son entreprise est la première phase à travailler avec les banques ou avec les prêts promis par l’etat. Et dans les scénarios les plus noirs possibles », répond Barthélémy Guislain. Evoquant tour à tour le dialogue social, primordial « pour embarquer les partenaires sociaux dans la conscience de la gravité de l’instant que l’on vit aujourd’hui », et le « partir lancé ». En clair, « dans ce moment de grande illisibilité, un entrepreneur n’a d’autre choix que d’interpréter, sans mettre ses clients et ses salariés dans l’insécurité. Mais dès qu’on trouve des alternatives de « partir lancé » qui permettent de rouvrir les commerces, comme les drives de Décathlon, de Leroy Merlin ou les « picking » de Boulanger, il faut foncer ! »

Pour surmonter la crise, l’exemple ne viendrait-il pas de ces entreprises familiales ? « Elles ont un rôle tout particulier d’inspiration dans le moment qu’on vit, car elles sont plus habituées à raisonner long terme et donc à se montrer, dans l’instant, plus résilientes... On sait passer les crises », détaille Barthélémy Guislain. Avant de conclure : « J’ai un espoir : que les solutions à la crise économique et sociale à venir viennent de l’intelligence collective, du dialogue social et des partenariats entre petits et grands. L'écosystème historiquement fermé de l'AFM va s'ouvrir et doit s'ouvrir. Nous devons nous ouvrir aux petites entreprises, au tissu d'entrepreneurs locaux pour apprendre d'eux. Je réaffirme la main tendue de notre écosystème à votre écosystème.»