Sportopia : Le textile connecté au service du bien-être

La jeune société amiénoise, triplement incubée, soutenue par Bpifrance, a mis au point un équipement textile technique connecté pour favoriser la récupération musculaire des sportifs. Objectif affiché : 12 M€ de ventes d’ici 2028.

A 46 ans, Ludovic Boulafrad a déjà vécu mille et une vies. Ce diplômé de mode (ESIV - La Fabrique) a notamment été assistant responsable production des costumes chez Disneyland Paris, assistant chef de produit chez Devred ou encore responsable d’usine textile en Egypte. Sa fibre entrepreneuriale se révèle en 2006 lorsqu’il crée Les trophées d’Amiens, un atelier d’insertion sociale et professionnelle de création de vêtements en textile recyclé. L’aventure prend fin neuf ans plus tard. Causée par la perte de plus de 50 K€ de subventions à l'occasion de la création de la grande région Hauts-de-France. « A l’époque, on ne parlait pas d’upcycling et de vête- ments de seconde main. J’étais fatigué de me battre avec le monde poli- tique », souffle Ludovic Boulafrad.

Les contours de son nouveau projet se dessinent en 2018. Lorsque ce féru de sport cherche une solution textile pour résoudre ses problèmes physiologiques. Il souffre de douleurs articulaires et éprouve des difficultés à récupérer musculairement après l’effort. « J’ai été contraint d’arrêter le sport de haut niveau. Car, à l’époque, ces maux étaient très peu connus et peu ciblés par les kinés », raconte l’Amiénois. Avant de poursuivre : « Un sportif sur cinq met fin à sa carrière pour cause de blessures. Et parmi les 192 000 sportifs blessés par an, la moitié relève de blessures musculaires ».

Ludovic Boulafrad rejoint Amiens Cluster fin 2018. Pendant un an, il développe un démonstrateur d’un dispositif de strapping en textile doté de capteurs. Objectif : faciliter et accélérer la récupération physique. Le projet connaît un coup de booster en pleine pandémie grâce à une double incubation ; au Vivalley Center (le cluster sport-santé-bien-être d’Eurasanté à Liévin) dès avril, puis au sein d’Euramaterials en septembre. « En tant que start up, il ne faut pas hésiter à voir large et toquer à toutes les portes », conseille le quadragénaire.

Triple incubé

Ludovic Boulafrad reçoit 15 K€ du fonds régional d’innovation fin 2020 pour passer du démonstrateur à la preuve de concept. L’année suivante, il poursuit le développement des capteurs de son textile technique connecté, crée une appli mobile de suivi de performances et lance ses premiers tests avec 22 sportifs de haut niveau. « Les résultats révèlent un gain important au niveau de la récupération des muscles avec un passage du chaud au froid en 4 secondes, contre 1 minute avec les strappings concurrents ».

En janvier 2022, sa société Sportopia reçoit le soutien de la Bpi à hauteur de 80 K€ via la bourse French Tech Emergence. « L’objectif était de valider notre technologie textile et la version autonome de notre dispositif désormais équipé d’une batterie externe et protégé par un brevet », déroule le fondateur, qui a rejoint Eurasanté au cours de l’année passée. En devenant ainsi l’un des rares — si ce n’est le seul — triple incubé régional.

Cette année, Ludovic Boulafrad vise une levée de fonds en deux temps. 500 K€, dans un premier temps, auprès de sportifs professionnels avec qui il entend faire évoluer son dispositif. Avant d’approcher des investisseurs pour sécuriser 1 M€ supplémentaire pour la phase industrielle. L’entrepreneur vise une commercialisation de son kit courant 2024 avec 15 salariés. Il prévoit d’employer une trentaine de personnes pour 12 M€ de ventes (sur un marché évalué à 50 M€) d’ici cinq ans.