Prud’hommes, vous avez dit prud’hommes?

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Un licenciement sur deux donne lieu à un contentieux juridique », prévient Bruno Platel, avocat en droit social au cabinet Capstan. C’est alors au conseil des prud’hommes que revient de juger ces affaires. Ce tribunal, original dans notre édifice juridique, permet la résolution des conflits du travail entre employeur et salarié par des socio-professionnels eux-mêmes, et ce à différentes étapes du contrat de travail, de sa signature, à sa rupture en passant par son exécution. Il peut s’agir, par exemple, de la requalification d’un CDD en CDI, d’une situation de harcèlement, d’un licenciement, pour motif personnel ou dans le cadre d’un plan social. Dans la quasi-totalité des cas, et notamment celui du non versement d’un salaire, la saisine du conseil doit être effectuée dans les cinq ans après le début du litige. 90% d’échecs en conciliation La juridiction est organisée en cinq sections : agriculture, industrie, commerce, encadrement et activités diverses.

 

Les jugements y sont rendus par quatre conseillers, magistrats non professionnels, deux issus du salariat, deux du patronat. Ensemble, ils sont d’abord chargés, lors du « bureau de conciliation », de rétablir le contact entre les parties afin qu’elles trouvent un arrangement à l’amiable. « Mais à ce stade de la procédure et dans le cas d’un désaccord persistant, les conseillers ne peuvent rendre de jugement », souligne Pauline Duytsche, juriste au cabinet Comptexxia à Boulogne sur Mer. D’où environ 90% d’échecs dans cette phase de conciliation. L’affaire est alors débattue en «audience de jugement ». Enfin, en dernier recours, quand les conseillers ne parviennent pas à s’accorder, un « juge départiteur », magistrat professionnel garant de l’impartialité, tranche la question au
Tribunal d’Instance . Cette étape concerne une part non négligeable d es contentieux présentés aux prud’hommes. Presque une moitié pour la section «commerce» du conseil de Lille en 2012. Les parties peuvent interjeter appel dès lors que la valeur totale des prétentions dépasse 4 000€. Ce fut le cas pour 61% des affaires en 2010 en France.

 

Avant de vous engager dans une procédure prud’homale, mieux vaut en connaître les arcanes. Voici quelques clefs. En termes de coût, 35€ de frais d’introduction de l’affaire en justice sont à la charge du demandeur. Soit, dans une grande majorité des cas, le salarié. Christelle Mioux, conseillère (CGT) en section commerce à Lille depuis 2008, constate que « 98% des affaires sont traitées à leur initiative ». Le salarié règle seul ses frais de justice. Il peut éventuellement bénéficier d’une prise en charge financière par l’Etat, l’aide juridictionnelle. A l’inverse, tous les frais de l’employeur sont à la charge de la société. Pas de grille de référence Les pertes ou gains des parties dépendent de l’issue du procès. Il n’existe quasiment pas de grille de référence des dommages et intérêts susceptibles d’être alloués. Dans la situation la plus fréquente, le licenciement pour motif personnel « sans cause réelle et sérieuse » par une entreprise de plus de onze salariés, un minimum de six mois de salaire est exigible par un salarié de plus de deux ans d’ancienneté. Le montant des dommages intérêts varie en particulier à partir du moment où l’on remplit ces deux conditions. Lors des audiences, la présence des parties est obligatoire.

 

Dans les faits, nombre de justiciables se font excuser et sont représentés. La loi n’oblige pas à prendre un avocat. L’employeur et le salarié peuvent être accompagnés, respectivement, d’un responsable RH ou d’un délégué syndical, par exemple. « La présence de l’employeur est néanmoins préférable pour mieux comprendre le conflit, pour l’apport d’un élément technique », explique Bernard Carry, conseiller employeur à Calais. Lors de la conciliation en particulier, les parties sont censées débattre des conditions d’un accord, et c’est le seul moment pendant lequel le témoignage des parties est susceptible d’être écouté. Leur absence peut donc nuire à la résolution à l’amiable du conflit.

 

BRUNO PLATEL, ASSOCIÉ DU CABINET CAPSTAN

 

Les salariés gagnent-ils toujours leur procès ?

 

Bruno Platel le reconnait, « une majorité des jugements semble condamner les employeurs ». L’explication se trouve peutêtre dans la faible connaissance du monde juridique de la part des entreprises, surtout des PME. Et si on met souvent la partialité des conseillers en jeu, reste qu’« on ne peut pas considérer que les prud’hommes rendent un jugement plus défavorable aux employeurs que ce que ferait la Cour d’Appel ». En 2011, 57% des arrêts ont été confirmés en Cour d'Appel. Dans les autres cas, c’est souvent un manquement à la procédure qui a entraîné l’annulation.

 

 

 

 

 

CHRISTELLE MIOUX, CONSEILLÈRE CGT AUX PRUD’HOMMES DE LILLE, SECTION COMMERCE

 

« Les prud’hommes sont un miroir du monde du travail »

 

Les prud’hommes sont un exemple de démocratie sociale. Mais que ce soit au bureau de conciliation comme en audience de jugement, la partie employeur est rarement présente. Or une absence répétée peut conduire le contentieux devant le Tribunal d’Instance. Là, le juge départiteur évalue les préjudices d’une façon différente de celle des conseillers. De même que la taxe d’introduction de l’affaire en justice, à la charge du salarié, l’absence trop régulière du justiciable employeur lors des délibérations révèle une certaine forme d’injustice.

 

BERNARD CARRY, MEDEF, PRÉSIDENT DU CONSEIL DE CALAIS, SECTION ACTIVITÉS DIVERSES

 

«Il n’y a pas suffisamment de conciliation »

 

Les prud’hommes constituent un système paritaire où les conseillers sont issus du monde économique mais formés en droit. Une formation des conseillers employeurs de 4 ou 5 jours par an est proposée par le Medef. Comme rien n’est écrit dans la loi, on ne peut exiger qu’ils y assistent, mais par respect, presque tous la suivent. Aux prud’hommes, nous regrettons seulement qu’il n’y ait pas suffisamment de conciliation. Seuls 5% des litiges y sont réglés. Or cette étape est l’essence même des prud’hommes.

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