La région à l'écoute de son industrie automobile

 

 

 

Plutôt que de longs discours, voici deux chiffres : 18,4 millions de véhicules produits sur le Vieux Continent en 2007, 14 millions aujourd'hui. Et la part de la France a encore plus reculé, avec un volume de production tombé de 3,5 millions à 2,2 millions. Autant dire que le secteur est sonné. Quid de la deuxième région automobile française, le Nord-Pas-de-Calais ? En cinq ans, les effectifs salariés (inscrits) ont fondu de 20%, tandis que la production de véhicule se repliait de 38%, celle des moteurs de 18%. Fermez le ban. Aussi, pour la deuxième année consécutive, la région et le conseil économique et social (CESER) ont tenu séance commune sur le sujet, en présence de tous les acteurs de la filière. « La décroissance du marché automobile est structurelle », constate Gérard Leclercq, directeur des opérations France de Renault. « Votre invitation est la preuve de la nécessité d'un débat au cœur de notre société. L'avenir industriel est aujourd'hui en jeu, il faut que l'ensemble des personnes concernées de près ou de loin par notre industrie puisse le comprendre », lance Denis Martin, directeur industriel du groupe PSA, évoquant un taux d'utilisation de ses usines françaises de 65% seulement en octobre.

 

[caption id="attachment_10887" align="alignleft" width="135" caption="Denis Martin, PSA : "L'avenir industriel est aujourd'hui en jeu""][/caption]

Pour autant, le Nord-Pas-de-Calais semble passer peu ou prou entre les gouttes, au moins celles des fermetures d'usines. Et le moyen-long terme paraît préservé avec de gros projets. L'accord de compétitivité a convaincu PSA de produire son futur utilitaire le K Zéro à Sevelnord, et Toyota de s'associer à cette plateforme. La Française de Mécanique prépare le lancement d'un nouveau moteur essence 3 cylindres au terme d'un investissement de 120 M€. Renault Douai prépare la relève de ses Mégane et Scenic, avec un programme d'investissement de 420 M€ qui aboutira en 2015. « En 2016, nous remonterons en production, inévitablement », assure Gérard Leclercq.

L'accord de compétitivité signé à Sevelnord a été évoqué à plusieurs reprises comme une condition sine qua non pour l'avenir du site et Renault a engagé une négociation nationale dans le même esprit. Ce que les salariés ne vivent pas tous bien. Jean-Pierre Delannoy, secrétaire régional de la CGT métallurgie, évoque même l'hypothèse d'un « chantage exercé sur certaines organisations syndicales pour ensuite étendre les accords de compétitivité partout dans le pays ». Plus inquiétant est le point de vue des équipementiers, peu représentés le 16 novembre. « Nous sommes frappés par le niveau d'activité particulièrement bas au troisième trimestre », relève Victor Netto, DRH de Faurecia. Dans la région, il ne compte plus que 34 intérimaires, un plancher historique. Erik Dourdin, PDG du groupe éponyme spécialiste en solutions de décoration et des logos (370 salariés), s'alarme aussi. « Si le financement de nos entreprises continue à être difficile, si le poids de l'administratif prévaut sur l'esprit d'entreprise, si le juridique devient l'élément majeur, nous risquons de voir de nombreuses sociétés industrielles ne plus investir ». Les équipementiers et fournisseurs (ils sont 260 dans la région) seront-ils capables de faire le gros dos jusqu'à l'hypothétique reprise? « On va avoir des creux, notamment chez des rangs 2 et au-delà, dont les trésoreries sont très fragiles », s'inquiète Philippe Julie, délégué général de l'Association régionale de l'industrie automobile.

 

 

[caption id="attachment_10888" align="aligncenter" width="150" caption="Didier Leroy, pdt de Toyota Europe : "continuer plus que jamais à travailler ensemble pour améliorer l'image de l'industrie""][/caption]

Didier Leroy, président de Toyota Europe, lui même originaire de la région, a le discours le plus fort envers eux. Conscient de l'impérieuse nécessité de garder ici les équipementiers de rang 1,2 et 3, il rappelle que Toyota Onnaing a rapatrié l'emboutissage anglais (90 emplois) et les garnitures de toit du Luxembourg (20 emplois) vers la région. « Ce qu'on attend de la région, c'est de continuer plus que jamais de travailler ensemble pour améliorer l'image de l'industrie. Je voudrais que tous ensemble en France et en Nord Pas de Calais, on soit fiers de nos réussites industrielles ».

OD