Interview de Marc Girard, président de Dunkerque LNG, filiale d’EDF chargée du projet du terminal méthanier

Le pilote du premier chantier industriel français dresse un état des lieux de ce projet d'un milliard d'euros. 

 A quel stade est arrivé le projet?

2011 a vraiment été l’année du lancement du projet, 2013 sera celle de sa montée en puissance. On est sur un taux d’avancement du chantier des réservoirs de 20%. Et aux environs du million d’heures de travail cumulées. Le puits d’accès du tunnel a été réalisé, le creusement va démarrer en avril. GRT Gaz a largement avancé sur le réseau en aval et rénové 50 km de canalisations, surtout au sud de Lille. Et 2013 verra le raccordement entre le site de Gravelines et le réseau. Il a par ailleurs été décidé de construire une canalisation entre la France et la Belgique, ce qui n’était pas prévu   : 40% des flux de gaz pourront y être redirigés. Dernier point, important en matière d’environnement, la zone d’accueil des oiseaux migrateurs de 20 hectares, en compensation de la surface gagnée sur la mer, est en cours de livraison.

Le climat de récession vient-il perturber les perspectives? En termes de calendrier, d'emplois?

Non, le planning de mise en service fin 2015 est confirmé, tout comme le budget, qui s’élève à un milliard d’euros, indépendamment des indexations qu’il faudra intégrer. Côté LNG, nous sommes très vigilants sur le respect des délais de paiement des fournisseurs. Et comme il s’agit du premier chantier industriel de France, on arrive à trouver des entreprises pour venir travailler, on ne connaît pas de difficulté. Notre grande satisfaction est que 100% de la création d’emploi et de la recherche de personnel pour la sous-traitance est réalisée localement, par la maison de l’emploi et la chambre de commerce. Plus de 80% des postes pourvus sur le chantier le sont dans le Nord-Pas-de-Calais. Sur 385 marchés ont été attribués à fin décembre 2012, 71% l’ont été à des entreprises régionales. Ce n’est pas une grande surprise car nous avons les compétences et les ressources sur les territoires, néanmoins les entreprises ne jouent pas toujours le jeu. D’un point de vue plus macro, la vraie question est de savoir ce que seront les marchés gaziers en 2016… entre les gaz de schiste américains, l’Asie et ses interrogations sur le nucléaire japonais et la croissance chinoise et un marché européen atone, on peut s’interroger.

Où en est la réflexion sur la valorisation des frigories?  
La construction de la boucle de froid qui permettrait d’alimenter la zone est actuellement suspendue. Nous ne sommes pas en mesure d’assurer au futur site suffisamment de volume pour que l’opération soit rentable. Le projet de 80 M€ sera repensé après la mise en service du terminal. En revanche, on réfléchit avec Dunkerque promotion à la construction d’une zone unique de transformation tertiaire, plus modeste, qui devrait voir le jour. Par ailleurs, une autre démarche, portée par la CUD, l’Université du littoral et des industriels tels que Dalkia et d’autres est en cours. Elle vise à lancer un centre de recherche et la construction d’un banc d’essai industriel pour permettre à de grands équipementiers et utilisateurs d’aller tester leurs utilisations???)sur du grand froid. Que ce soit dans le sous-marin, le spatial ou le gaz naturel liquéfié, bien sûr. L’intérêt est de regarder la tenue et la résistance du matériel dans ces conditions. Ce type d’installation n’existe pas en Europe, cela permettrait d’attirer de nouvelles compétences sur Dunkerque.

Propos recueillis par Marie Raimbault