Faire du business avec la Chine

Avec 15 % du PIB mondial d'ici 2020, la Chine est appelée à devenir un partenaire incontournable. La naissance d'une classe moyenne qui veut à tout prix consommer à l'occidental attire irrésistiblement les étrangers. Mais pour aborder la Chine, certaines règles de base sont à respecter. "La prudence est de mise dans le choix d'un partenaire, Il ne faut pas hésiter à investir du temps et de l'argent avant de conclure un accord", martèle Fanny Péant, conseillère en développement international à la CCI International Nord-Pas-de-Calais.

Prudence et...

Les règles dans l'empire du milieu ne sont pas les mêmes que chez nous et surtout elles peuvent changer du jour au lendemain. Certains en ont fait les frais comme Marc Simoncini, le patron du site de rencontres Meetic, qui a investi en trois ans 20 millions d'euros en Chine en pure perte. Le groupe Holder a tenté une incursion en Chine en 2007 et refermé trois ans plus tard ses sept Boulangeries Paul. En cause : le choix du franchisé qui ne respectait pas les standards de la marque... Pas dégouté, le groupe se dit prêt à renouveler l'expérience. Même tentative malheureuse pour le spécialiste de l'éclairage hospitalier roubaisien Trato TLV. "Nous avions trouvé sur des salons internationaux un partenaire qui est venu chez nous et que nous avions également rencontré en Chine. Nous avons été surpris de ne plus avoir de nouvelles. En réalité, il avait copié une partie de nos produits qu'il vendait en direct..." Francis Picha, le Pdg de cette entreprise qui exporte 30 % de son CA, n'a pas baissé les bras et s'apprête à redémarrer un partenariat avec un chinois de Hong-Kong, bardé cette fois sur un plan juridique.

"Pour vendre aux Chinois, il faut se différencier par une créativité, un savoir-faire. Les Chinois sont devenus les premiers consommateurs au monde de produits de luxe", affirme Fanny Péant. L'architecte lillois Robert-Jan Van Santen, s'apprête ainsi,de son bureau de Hong Kong, à travailler sur la façade de 120 mètres de longueur du futur magasin "Un chinois ne vous dira jamais non de peur de perdre la face" , Fanny Péant, conseillère en développement international, CCI International Nord-Pas-de-Calais.Louis Vuitton de Pékin. "Nous apportons une technicité unique en Asie en fournissant une réponse aux contraintes d'isolation acoustique ou de lumière." Au programme également : les façades de deux tours de 180 mètres de hauteur à Shanghai. D'autres encore comme la Compagnie Française de Chaudronnerie à Blendecques dans le Pas-de-Calais ont ouvert une filiale en chine au départ pour suivre Lesaffre ou Roquette, leurs clients nordistes. Leur filiale emploie aujourd'hui 350 personnes...

...vigilance en permanence

"Le souci avec la Chine, c'est que nous devons régler deux mois avant de recevoir la marchandise, mobilisant ainsi notre trésorerie. Même si les achats nous reviennent moins chers, nous ne pouvons par nous permettre des défauts dans la qualité", pour blinder Chiffres clés
1,3 milliard d'habitants
Superficie : 17 fois la France
Croissance du PIB : 10,3 % en 2010
Prévision 2011 : 9, 5 %
1,1 million de millionnaires en 2010
Classe moyenne : 295 millions de personnes (+25 millions/an)
ses approvisionnements, Elisabeth Vidal, la créatrice de Elistyl, société de VAD de produits pour les professionnels de la coiffure, a fait appel à une société spécialisée dans le contrôle qualité.

"Le Chinois a tendance à dire oui et à essayer ensuite de trouver la solution pour remplir le contrat au mieux", prévient Grégoire Prouvost, originaire de Roubaix, co-fondateur d'AQM, société indépendante d'inspection textile implantée à Shanghai. Poussé par la flambée des prix des matières premières et la hausse des salaires dans les villes, le chinois a une fâcheuse tendance à sous-traiter le travail. Et là, gare aux abus en tous genre : qualité des matières, risques sociaux... "Les conditions peuvent changer à tout moment. Nous ne devons jamais relâcher notre vigilants." Le coût de cette inspection sur les sites de production ? 1% environ du coût global. Indispensable, quand on sait que 15 à 20 % des commandes inspectées posent problème !

Cela devrait s'améliorer car la Chine lutte contre son image d'usine du monde. Elle investit dans la recherche, dépose des brevets en quantité et devient leader mondial dans de nombreux domaines innovant comme le photovoltaïque ou l'énergie éolienne.

Richard Gumez

Il a passé dix ans en Chine pour Roquette

"Adaptabilité et patience", sont les deux principaux conseils que donne Richard Gumez, si l'on veut travailler avec la Chine. Cet ancien Directeur Industriel Asie de Roquette vient de fonder Kapasie, un cabinet conseil qui accompagne les entreprises françaises sur le marc hé chinois. Le leader mondial des polyols est aujourd'hui l'un de ses clients.

"Mes premiers contacts avec la Chine remontent à 1996 lorsque Roquette a commencé à regarder de plus près le pays. Il a fallu être patient et attendre 2001 pour racheter les activités sorbitol du coréen LG. Je suis parti en tant qu'expat pour trois ans, j'y suis resté dix..." Une époque fantastique où il a dû surmonter toutes sortes de difficultés : d'abord en terme de ressources humaines, "le turnover est énorme. Le personnel va sans cesse vers le plus offrant", difficultés culturelles ensuite : les usages sont aux antipodes, sans parler de la barrière de la langue. Richard Gumez se souvient encore des soucis bureaucratiques qu'il a rencontré pour faire réaliser un branchement ferroviaire dans une usine. Des pages et des pages de documents pour obtenir l'accord des autorités compétentes... A son départ en 2010, le groupe possédait quatre sites et employait déjà plus de 1000 personnes en Chine.

Richard Gumez estime que la Chine offre des opportunités fantastiques. "Le pouvoir d'achat de ses habitants ne cesse de croître. La Chine est devenu le premier marché au monde, mais elle n'attend pas les européens".

"Bien communiquer avec vos interlocuteurs chinois", un livre de Marc Meynardi, Editions Afnor.

Pour travailler efficacement en Chine et parce que l'aventure chinoise peut s'avérer aussi exaltante que périlleuse, Marc Meynardi conseille de décrypter certaines clés de la pensée chinoise. L'approche du temps, l'importance du "sauver la face", la recherche de l'harmonie : les piliers de la culture chinoise sont abordés sans tabou par cet inconditionnel de la Chine dont le premier voyage remonte à 1984.