EXPORT : la région doit passer la surmultipliée

Image illustrative Eco121, mensuel des décideurs des hauts de France Image illustrative Eco121, mensuel des décideurs des hauts de France

 

 

Hors l’export, point de salut ? Voici plusieurs années que cette priorité est inscrite en lettres d’or au fronton du Schéma régional de développement économique. Le message est répété sans cesse par la région à travers son vice-président à l’économie, Pierre de Saintignon, l’Etat, Oséo, rabâché par les sociétés d’investissement, valorisé par quantité de prix et trophées.

La région occupe fièrement le cinquième rang national, avec une valeur économique majeure réalisée à l’export, soit plus de 32 milliards d’euros. Après un coup de froid lié à la crise depuis 2009, les chiffres remontent légèrement. Mais force est de constater que les statistiques ne décollent guère. Derrière les géants de l’exportation que sont Lesaffre, Roquette Frères, Bonduelle ou Arc International, les entreprises plus petites n’osent que rarement franchir le pas. Comme notre sondage le relève, les obstacles restent forts et la culture de l’international n’est pas innée chez nous comme elle l’est par essence dans les petits pays comme la Belgique ou le Luxembourg, dont le marché intérieur ne suffit pas, ou les pays d’Europe du Nord, très ouverts sur le monde, à commencer par un apprentissage des langues bien plus efficace qu’ici. « On a à la louche cinq entreprises qui représentent 30% du chiffre d’affaires régional à l’export, et cinq pays qui pèsent 53% de la destination exportatrice », décode Didier Decoupigny, directeur de la mission internationale du Conseil régional. La pédagogie reste à mener sur les bataillons de dirigeants qui n’imaginent pas pour les uns ou qui craignent pour les autres de tenter leur chance. Or, même dans les services, l'international est possible : le loueur de nacelles Salti (lire par ailleurs) envisage une implantation en Europe de l'Est, la société de formation diplomate par Internet Enaco vient d'ouvrir sa toute première filiale étrangère à Casablanca.

 

 

La dernière production de l’OREI (Observatoire régional des échanges internationaux), enquête réalisée auprès d’entreprises actives à l’international, montre que 41% de nos entreprises ont enregistré un bilan d’activité en hausse à l’export l’an dernier, pour 22% seulement en baisse, les autres évoquant une stabilité du curseur. Pour 2012, elles sont 43% à tabler sur une augmentation de l’export, contre 13% à anticiper un recul.

 

Volontarisme affiché

La mise en place d’une structure mutualisée CCI International, dont le modèle d’intégration sur un lieu très identifié est sans équivalent en France, a permis d’apporter un effet guichet unique dans un univers où les acteurs publics et privés peuvent parfois donner l’impression d’un maquis complexe. L’objectif chiffré de doubler le nombre d’entreprises exportatrices est loin d’être atteint, mais l’effort et le volontarisme affiché sont constants. Depuis quatre ans, une i-Week est organisée dont la quatrième édition aura lieu du 20 au 29 juin. Cette année, elle sera l’occasion, entre autres, des premiers trophées de l’Investissement international (Nord France Invest) mais aussi d’un événement d’envergure, Futurallia (la dernière édition a eu lieu au Texas), appelé à accueillir des dirigeants de tous pays pour organiser sur un temps court un maximum de rendez-vous business. Plus largement, les acteurs régionaux prévoient en 2012 d’accompagner le déplacement de 400 entreprises à l’étranger, et d’augmenter le nombre d’entreprises exportatrices de 200 tous les ans, à raison de 15 par pôle de compétitivité ou d’excellence.

 

L’agence de développement Eurasanté est une habituée de longue date des missions internationales pour une filière plus exportatrice que la moyenne. « On accompagne aujourd’hui 64 entreprises petites et moyennes », expose Christelle Rondel, responsable des opérations internationales de la rue Eugène-Avinée. Les formules sont très variées, de la représentation intégrale d’entreprises qui ne peuvent pas se rendre sur place à l’organisation de stands communs ou à des missions de visites très préparées en amont sans exposition. Les calendriers de rendez-vous personnalisés sont organisés à l’avance par l’équipe d’Eurasanté. Bon marché, bien préparée, la formule fonctionne. « La meilleure preuve, c’est que les entreprises reviennent souvent d’un salon à l’autre », poursuit Christelle Rondel. Il faut dire que les conditions économiques sont alléchantes. « On est partis sur le salon ArabHealth à Dubaï 5 jours ; hôtel et avion inclus ça nous a coûté au final seulement 1 500 € », se félicite Charlotte Goldstein, responsable export du spécialiste de compléments alimentaires Arlor Natural Scientific à Roubaix (lire plus bas). Et elle précise aussitôt que l’export ne fonctionne pas sur des coups mais sur une stratégie de long terme. « Il ne faut pas espérer un retour sur investissement en six mois. » « Les entreprises ont bien compris qu’il fallait chercher la croissance ailleurs. Mais l’international, c’est toujours long et beaucoup n’ont pas toujours la capacité financière d’être patientes », confirme Jérôme Laget, chez Oséo, qui a déployé des outils financiers spécifiques pour les Pme afin de soutenir les efforts à l’export, y compris sous forme de caution et de contre garanties et des prêts participatifs export.

 

La politique export se construit, nécessairement. Quand les grosses entreprises ont des divisions export structurées, le sujet est plus complexe pour les Pme. La réflexion amont est indispensable. « Sans stratégie, vous êtes sûr de vous gameller », lance Xavier Honnart, ex-cadre dirigeant de Camaïeu, qui a fondé l’an dernier le cabinet conseil à l’international New Co. Dubitatif sur les actions collectives, « qui volent à 10 000 m d’altitude », il préconise une politique terrain avec des partenaires bien identifiés. « Sans moyen, c'est mission impossible, complète Xavier Durand, associé de Dorea Consulting, société basée à la fois en France et en Allemagne. Or là où les entreprises allemandes mettent 3 personnes et un budget important perdant un an, les entreprises françaises vont souvent se limiter à une personne et un budget réduit. » Pour lui, pas la peine d'aller à l'autre bout du monde. « Il y a encore beaucoup à faire en Europe. » Il reste que tenter sa chance hors de la zone euro devient de plus en plus attractif avec la dévaluation de facto que vit notre devise commune ces dernières semaines. Et tous les indicateurs laissent à penser que la dérive va se prolonger. L'occasion rêvée ?

 

 

Chiffres clés

Export de la région en 2011 : 32,2 Mds d’€

Importations : 39,5 Mds d’€

Solde de la balance commerciale régionale : 7,3 Mds d’€

 

 

Des investissements étrangers fructueux

Dans l'autre sens aussi, l'international est une chance pour la région. Depuis des années, le Nord-Pas-de-Calais est une des championnes françaises des implantations étrangères, depuis Häagen Dasz à Arras jusqu'à Toyota (Onnaing) en passant par GSK (Saint-Amand, photo), Tim (Quaëdypre), YKK (Seclin) ou Ecover (Boulogne). Le fruit d'une attractivité qui, si elle s'est un peu émoussée, reste forte. En 2011, Nord France Invest (ex-NFX) a suivi 170 projets, dont 39 détectés en propre. Au final, 7 projets se sont concrétisés, correspondant à la création ou au maintien de 1 316 emplois. Objectif 2012 : 12 projets pour 1 500 emplois.

 

 

« Il y a plus de collectionneurs de marques que de vrais distributeurs »

Charlotte Goldstein, directrice export d’Arlor natural Scientific (compléments alimentaires, Roubaix, 50 salariés)

« Je suis arrivée en 2011 dans l’entreprise pour démarrer l’international. On s’adapte aux différents pays : les produits bio pour les pays nordiques, la prescription médicale au Maghreb, les shopping malls au Moyen-Orient. Il faut être vigilant car il y a plus de collectionneurs de marques que de vrais distributeurs. Je recherche à travailler avec des distributeurs locaux à qui je donne une exclusivité territoriale. Notre objectif est clair, c’est de « supérer » à terme le chiffre d’affaires France. Pour les USA, nous avons missionné CCI International pour une étude de prospection individuelle sur le marché des compléments alimentaires minceur et antichute de cheveux, et pour mener une mission sur place par rapport à la distribution. Mais notre bilan à 18 mois est très encourageant ! »

 

 

« On espère doubler notre CA global avec la Chine »

Lionel Herbeau, dirigeant d’Herbeau (Lille, 25 sal, 2,5 M€ de CA)

« Herbeau est naturellement tourné vers l’international. Nous réalisons d’ailleurs 80% de notre chiffre d’affaires à l’export. Dès 2003, nous avons commencé en Russie, où nous travaillons essentiellement avec des designers d’intérieur. On a trouvé un bon partenaire et la Russie est devenue notre troisième zone export, derrière les Etats-Unis et l’UE. Je crois beaucoup aujourd’hui à la Chine, où nous allons monter un Herbeau China en joint venture, avant l’été. C’est un relais de croissance important puisque, si nous réalisons un ou deux projets dans l’année (dont un gros complexe de congrès susceptible d’accueillir le G20), ça fera doubler le CA de la société. Nous aurons un site web www.herbeau.cn. Notre difficulté est que nous sommes sur une niche worldwide alors que nos moyens ne le sont pas. Je suis à la pêche aux fonds pour assumer la croissance. »

 

 

« Les salons internationaux ont un coût mais nous permettent de nous faire connaître »

Arielle Lévy, cofondatrice de l’Herbe Rouge (prêt à porter, Roubaix, 3 associés)

« Nous sommes une toute jeune société mais extrêmement expérimentée par ses associés. On a une vision claire et cohérente et on a mis en place tout un réseau d’agents dans différents pays. Tous nos budgets de com et de développement portent sur notre présence sur les marchés cibles avec des partenaires et des salons de premier plan. Cela a un coût mais a permis aussi de nous faire connaître. Il est inscrit dans l’ADN de l’Herbe Rouge de travailler à l’international. Nos collections ont toujours pris en compte une adaptation aux différents marchés, en gardant leur tronc commun du développement durable, de qualité, confortables, ingénieuses et à prix accessible. Certains marchés sont plus murs comme l’Europe du Nord où le développement durable est un art de vivre, alors que le Japon sera plus sensible au design, à la qualité et au rapport qualité-prix. »

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