Des acteurs de la finance locale réagissent*

Image illustrative Eco121, mensuel des décideurs des hauts de France Image illustrative Eco121, mensuel des décideurs des hauts de France


"Nous sommes des victimes collatérales"
ÉRIC COTTE, président du Comité régional des banques

"Il y a une ambiance actuellement qui fait que ces résultats ne sont pas sur- prenants. On a tendance à dire que la crise est de la faute des banques. Or on a une crise d'endettement et de financement des déficits publics ! Mais dans une période pré-électorale la confusion peut être tentante. Ces dettes d'Etat sont venues dégrader la situation car les économies en deviennent de moins en moins solides. Dans le même temps, les banques portent ces dettes car on leur demande de soutenir des emprunts d'Etat.
Nous sommes des victimes collatérales : quand les dettes souveraines sont dégradées, cela dégrade nos fonds propres et donc nos capacités à prêter, phénomène amplifié par les exigences de Bâle 3. Ces contraintes, imposées par le régulateur peuvent paraître paradoxales quand l'économie connaît des problèmes de croissance. Il est clair que, dans une situation de crise, les business models sont plus compliqués, la demande est moindre, les investissements des chefs d'entreprise sont en retrait.
Quant à la différence entre l'appréciation des banques en général et de sa banque, cela a toujours été. On a toujours une bonne image de la banque à travers une personne physique que l'on connaît, avec qui le chef d'entreprise a un dialogue, et une image beaucoup moins bonne de l'institution, présentée comme bouc émissaire. Concernant le crédit, c'est notre métier de prêter à l'économie ! Mais une entreprise fragile avant la crise sera encore plus fragilisée par la crise de la demande, et on peut comprendre qu'il lui sera plus difficile de trouver des financements demain. Que les grosses dettes syndiquées soient beaucoup plus compliquées à boucler qu'avant 2008, c'est sûr, mais il n'y a pas de credit crunch, j'en veux pour preuve la concurrence sur les taux à laquelle continuent à se livrer les banques aujourd'hui."


"L'image des banques est affectée mais pas sinistrée"
FRANÇOIS MACÉ, directeur général du Crédit Agricole Nord de France

"Ces résultats contrastés m'amènent des commentaires de plusieurs ordres. Sur le climat de défiance qui semble progresser, les réponses sont très clairement différentes selon que l'on aborde l'image collective des banques (peu de confiance en général, 51 %) et celle de sa propre banque (58 % de relations satisfaisantes et pas de changement qualitatif depuis la crise, un point à souligner !). C'est un paradoxe que nous connaissons : la crise sans précédent observée depuis 2008 a impacté l'image collective des banques qui apparaissent gravement fautives, mais dans le même temps nous observons un taux de satisfaction de nos clients qui se maintient et qui, pour nos clients entreprises, reste bon. Les clients restent plus confiants dans leur banque que dans les banques en général. Nous y voyons la preuve de la qualité de notre travail de maillage du territoire.

Existe-t-il un hiatus entre nos progressions d'encours affichées (+3,3 % pour 2011, dont près de 4 % pour les Tpe-Pme) et le sentiment exprimé sur la difficulté toujours plus grande à emprunter ?
Tout d'abord, nous avons été surpris en 2011 par la bonne adaptation des entreprises régionales à la conjoncture, une résistance qui s'est traduite par des niveaux de risque bien meilleurs qu'attendus. C'est un indicateur avancé : la situation, de notre point de vue, est plus soutenable qu'en 2008. Mais surtout, nous avons effectivement continué à prêter et nous n'avons en rien durci nos conditions d'octroi, même s'il faut nuancer ceci de deux manières : certains projets d'investissement ont été différés, aussi la réalisation de nouveaux crédits a-t-elle été ralentie sur certains marchés ; ensuite, une moyenne ou grande entreprise n'a pas les mêmes difficultés qu'une Tpe, qui souffre plus.
Enfin, si une banque mutualiste, proche de ses sociétaires, sensibilisée au terrain, ne lâche jamais un client, nous faisons forcément encore plus attention quand nous analysons le projet d'une société que nous ne connaissons pas. Dans le cas contraire, nous serions taxés d'imprudence.

La situation va-t-elle encore se tendre ? Les banques sont le métier le plus contraint du monde, et la réglementation en cours (Bâle 3, qui ne s'appliquera pas, rappelons-le, au monde bancaire outre Atlantique, les nouvelles taxes, les ratios de fonds propres) n'a d'équivalent pour aucun autre métier. Dans ce contexte, le métier bancaire tel que nous le pratiquons va sans doute être amené à changer et la nature de la distribution de crédit évoluer pour améliorer le ratio collecte/crédit, en particulier dans une région créditrice comme la nôtre. Par exemple, malgré nos efforts, les banques mutualistes ne pourront pallier pour les collectivités locales la demande laissée vacante par la situation de Dexia (40% de part de marché)... Quand l'orage vous touche il ne sert à rien de compter les gouttes : le plus important sera de continuer à faire notre métier auprès de nos clients, les rassurer, et réinvestir dans l'économie du Nord-Pas-de-Calais chaque euro collecté auprès de nos clients."


"Les entreprises ne sont pas délaissées !"
MAURICE WONNER, directeur régional de la Banque de France*

"Les entreprises de la région ne sont pas délaissées en termes de financement bancaire. A fin décembre 2011, l'encours de crédit utilisé par les entreprises en France avait augmenté de 5,1 %. Dans la région, cette évolution est de +10,1 % ! Les encours de crédit atteignent 39 milliards d'euros, et les lignes mobilisables disponibles sont encore de 9 à 10 milliards. Il est vrai qu'il se produit des reconfigurations avec Bâle 3, qui peuvent susciter des inquiétudes. Mais nous ne relevons pas de phénomène de credit crunch. Le financement des entreprises par les banques fonctionne bien.
Et côté médiation du crédit, on a globalement très peu de difficultés, avec un stock stable de 20 dossiers. Il y a eu un petit coup de feu à l'automne avec dix dossiers en plus, mais aujourd'hui, c'est retombé. C'est plutôt rassurant."
* Lors de la présentation de l'enquête de conjoncture Banque de France.


"Les accords bancaires sont difficiles à obtenir, mais pas impossibles"
BENOÎT GARY, gérant de Credi-Pro, courtier en financement

"Les entreprises ont des besoins de financement court terme et moyen terme que les banques ne facilitent pas à l'heure actuelle. Elles ne souhaitent pas s'engager sur des encours en absence de flux correspondant. Bâle 3 ne facilite pas non plus l'obtention de financements. Dans cette période de crise, les procédures sont compliquées et les accords bancaires sont difficiles à obtenir mais pas impossibles. Les périodes de tension financière amplifient ce phénomène. C'est d'autant plus paradoxal qu'on n'a jamais vécu une période aussi faste en nombre d'organismes de contre-garanties. Ce contexte économique difficile renforce notre métier de courtier : parfaitement au fait des circuits et des exigences bancaires, il sait construire la demande de financement avec une ingénierie financière adaptée, en tant qu'interlocuteur unique pour l'entreprise. Qu'il s'agisse de création, de reprise ou de développement, je pense que tous les besoins en financement cohérents et équilibrés peuvent trouver une solution."


"Une vraie problématique de ratio de fonds propres"
FABRICE TALANDIER, directeur de l'Adie Nord-Pas-de-Calais

"L'Adie est spécialiste du microcrédit professionnel pour ceux qui ont un projet de développement ou de création mais qui, de par leur situation, n'arrivent pas à trouver un crédit classique. Nous en avons réalisé 480 l'an dernier en région. Nous pouvons le faire car l'Adie est une association qui emprunte aux banques pour prêter ensuite, par dérogation à la loi bancaire. Nous aussi, nous avons eu une petite dégradation du risque en 2010 et nous avons dû nous aussi être un peu plus sélectifs. Mais en 2011, nous avons progressé de 25 % et nous devrions être à +15 % cette année.
Les banques sont confrontées à une vraie problématique de ratio de fonds propres. On ressent une exigence de qualité de dossier et de connaissance précise de ce que le chef d'entreprise veut faire et comment. C'est clair qu'une banque ira difficilement financer une personne de 30 ans au RSA qui a besoin de 3 000 ou 4 000 euros pour se lancer, ce que nous savons faire. La banque financera plus facilement des prêts de 30 000 euros. Mais nos études de pérennité et d'insertion montrent que 40% des créateurs que nous accompagnons trouvent ensuite un crédit bancaire classique dans les deux ans."

* D'autres témoignages à lire dans notre prochaine édition.

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